Toujours motivé et créatif les Neg’Marrons sont de retour cette année avec l’album « Valeur sûre ». Après huit ans d’absence le duo livre un nouveau projet bon pour le moral : une bonne excuse pour retourner mettre le feu sur scène !
JustMusic.fr : Tout d’abord dans quel état d’esprit étiez-vous, qu’est ce qui a déclenché ce nouvel album ?
Neg’Marrons : Il y a deux raisons. La première c’est une attente de notre public, à travers les réseaux sociaux et au constat qu’on a pu faire en étant continuellement sur scène et dans les clubs. Notre public réclamait un nouveau projet. De plus, comme on est toujours sur les routes, régulièrement en showcase, nous-même on a senti qu’on tournait un peu en rond, on avait besoin d’un nouveau répertoire pour faire évoluer notre show. C’est ce qui nous a boosté aussi.
JustMusic.fr : Le dernier album remonte à huit ans. Qu’avez-vous fait durant tout ce temps ? Vous étiez toujours dans la musique ?
Neg’Marrons : On n’a jamais quitté la musique. Nous faisions des concerts notamment grâce au titre « Petites îles » avec Cesaria Evora, qui nous a ouvert des portes, emmené dans des endroits du monde où l’on n’avait jamais joué encore : le Pacifique et l’Asie par exemple. On fait chacun partie d’un collectif, à savoir le Bisso Na Bisso (Ben-J) et la Mc Malcriado (Jacky), ce qui demande pas mal de temps. Et puis, il y a notre label et notre studio à gérer. Ce studio c’est notre laboratoire ce qui nous permet d’expérimenter, de continuer à créer, de développer des artistes. Pour le reste du temps on en a aussi profité pour développer d’autres business et passer du temps avec nos familles respectives.
JustMusic.fr : Combien de temps avez-vous passé sur ce dernier projet ?
Neg’Marrons : C’est un album qui nous a quand même pris trois ans. Il y a quatorze titres mais c’est le nectar de ces trois années de créativité. On a fait énormément de morceaux donc ces quatorze titres sont une sélection, un concentré du meilleur de notre art.
JustMusic.fr : Vous avez découvert d’autres paysages, d’autres populations. Est-ce que ces découvertes vous ont influencé pour ce projet ?
Neg’Marrons : Forcément un petit peu, dans le sens où aujourd’hui on est dans une ère ou la musique fusionne : fusion des styles, des sonorités, des artistes. On le voit avec des nouveaux genres comme l’afro trap ou Justin Bieber qui reprend des sonorités caribéennes dans ses titres. Le fait de voyager et d’écouter plein de sonorités variées ça a forcément une influence sur la création du moment.
JustMusic.fr : L’album s’appelle « Valeur sûre ». Pourquoi ce nom ? Est-ce pour dire que vous êtes un duo immortel, ancré dans la musique en France ?
Neg’Marrons : En fait il y a une double lecture derrière ce titre. La première chose c’est que c’est un nom qui revenait souvent pour nous décrire. Le public nous donnait cette appellation dans les concerts et dans la rue. La deuxième chose c’est un questionnement personnel, à savoir quelles étaient nos valeurs sûres. La foi, le respect, la transmission, la famille… tout ce qui contribue à notre bien être en fait. Ce titre correspondait en plus à toutes les idées qu’on voulait aborder dans ce projet.
JustMusic.fr : Qu’attendez-vous de ce nouvel album ? Faire plaisir à la base fan ou allait conquérir un nouveau public ?
Neg’Marrons : Quand on fait un disque, tout artiste tel qu’il soit a envie que son projet aille le plus loin possible. Le premier but était de se faire plaisir et d’être satisfait artistiquement. Ça c’est fait ! (Sourire) Et ne pas décevoir les gens qui nous suivent depuis le début ; pour l’instant nous avons des bons retours de nos fidèles. Le public a l’air heureux de nous retrouver avec ces nouveaux titres. Après oui, on essaye toujours de gagner un nouveau public, plus jeune, qui ne nous connaît pas forcément. Le projet c’est de toucher le plus de monde possible.
JustMusic.fr : Vous avez un titre qui s’appelle « Le monde bouge ». Vous soulignez qu’aujourd’hui tout va très vite, notamment dans la musique, quelle durée de vie donnez-vous à ce projet ?
Neg’Marrons : Disons que notre époque a changé notre manière de créer. On ne s’arrête jamais de créer, on est beaucoup plus productif qu’avant. Il y a quelques années, après la sortie d’un album, on pouvait prendre un an ou deux avant de se replonger dans un nouvel opus, aujourd’hui ce n’est plus le cas. La preuve, « Valeur sûre » vient de sortir et on travaille déjà sur celui d’après. Ce qui est sûr c’est qu’on on va défendre cet album sur la longueur, notamment grâce à notre tournée qui débute en septembre.
JustMusic.fr : « Fast food music » : Que définissez-vous par cette expression ? Etes-vous fermés à la nouvelle génération d’artistes ?
Neg’Marrons : La « Fast food music » c’est la musique vite fait, vite consommée et vite oubliée. Aujourd’hui il y a pas mal de hits mais très peu de classiques ! Ce morceau c’était aussi pour revenir en force, de faire un point sur le « game » et de mettre un coup de pied dans la fourmilière. C’est histoire de dire, ne perdons pas de vue l’artistique et ne nous focalisons pas sur le nombre de clics.
JustMusic.fr : Vous faites partie des groupes pionniers dans le rap français. Est-ce que vous vous sentez obligé de revenir pour rappeler les valeurs et les codes de cette musique ? En sachant que d’autres comme Kool Shen par exemple, sont aussi de retour.
Neg’Marrons : Franchement notre discours n’est pas de dire que tous les jeunes artistes sont nuls, il y en a beaucoup que nous apprécions : Dosseh, MHD, ou encore Niro. On n’est pas là pour faire la morale, pour passer pour des vieux cons. Chacun s’exprime à sa manière, mais on a tenu à mettre ce petit coup de pied dans la fourmilière.
JustMusic.fr : Car si on regarde vos featurings on pourrait penser que vous appréciez plus les anciens (Dry, Passi…) ?
Neg’Marrons : Oui c’est vrai… Passi c’est la famille donc ça s’est fait naturellement, il nous a pas mal conseillé sur ce projet, il passait régulièrement au studio et il se sentait de poser sur le titre « La monnaie 3.0 ». En ce qui concerne Dry ça fait un moment que l’on voulait bosser ensemble. On avait besoin d’un technicien, il a ce kung-fu verbal et c’est ce qu’il nous fallait. Il n’y a pas eu de calcul, aujourd’hui on connaît la plupart des artistes ; ancienne et nouvelle génération comprise. On a accès à un panel d’artistes urbain très large, on aurait pu solliciter ceux qui buzzent le plus, mais ce n’est pas notre manière de faire. On marche aux coups de cœurs.
JustMusic.fr : Sur ce nouveau projet vous gardez votre âme positive, ce côté « Lève- toi bats-toi ». C’est forcé ou naturel ?
Neg’Marrons : Aujourd’hui on sait que la vie est faite de haut et de bas, de moments de faiblesse, de périodes de doutes et quand on est dans ces situations ont a envie d’être boosté. On est porteur d’un message qui va dans ce sens-là. Si on en est là nous aujourd’hui c’est aussi parce qu’on a eu des grands frères qui nous ont soutenus. On pousse les gens à donner le maximum, à aller le plus loin possible dans leurs projets.
JustMusic.fr : Vous avez repris le titre « La monnaie », sorti en juin 1995. Pourquoi avoir choisi de remettre ce titre à jour ? Vous auriez pu faire un album « Neg Marrons 3.0 » car finalement en vingt ans les thèmes n’ont pas énormément changé ?
Neg’Marrons : Tout à fait. Que les thèmes soient encore d’actualité c’est bien car cela veut dire que notre musique et que notre message est intemporel, mais en même temps ça fait peur. Ça veut dire que les choses n’ont pas évolué ou que parfois elles ont évolué dans le mauvais sens. Pour « La monnaie 3.0 » on s’est rendu compte que c’était de plus en plus dur pour les gens et que c’est cette monnaie qui est au centre de tous les débats. Plus que jamais elle conditionne le bonheur de chacun. C’est notre constat vingt ans après. Sans prétention aucune, tous les grands artistes, toutes les références ont ces messages intemporels : Bob Marley, Nina Simone, U2…
JustMusic.fr : Le morceau « Président » est l’exemple de votre savoir-faire en texte engagé mais dans une mise en forme sympathique. C’est recherché ?
Neg’Marrons : C’est la raison pour laquelle on fait du reggae. Dans la forme cette musique permet de faire passer des messages engagés sans pour autant être agressif. C’est un morceau qui parle de climat de déception dans lequel on se trouve aujourd’hui tout en ayant du second degré. Pour que le message passe mieux aussi. On prépare notre programme pour 2017 ! (Rires)
JustMusic.fr : Neg’Marrons c’est quasiment 20 ans de carrière, cinq albums. Est-ce que vous sentez l’heure du « Bilan » approcher ?
Neg’Marrons : Comme on l’a dit précédemment on travaille déjà sur la suite. Mais le bilan on le fait tous les jours en fait. Pour avancer on regarde de temps en temps dans le rétro : les choses biens, les erreurs et les objectifs validés ou non. On se remet en question tout le temps. D’un point de vue musical on réfléchit à un deuxième « Bilan » car on nous le réclame fréquemment. Après ce titre est un classique donc c’est peut-être dangereux… A étudier. Mais la passion est toujours là et on continue de progresser.
JustMusic.fr : Que peut-on vous souhaiter pour la suite ?
Neg’Marrons : De continuer à faire de la scène, avec notre tournée qui commence en septembre. On a une date importante le 2 juin prochain au Trianon, cela faisait longtemps qu’on n’avait pas fait une grosse scéne parisienne. On peut nous souhaiter encore beaucoup de titres, de continuer la musique.
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Fabien BRIET
