INTERVIEW : Rencontre avec KLON

KLON est de retour avec « KLONBUSTER », un premier album incandescent fusionnant pop, punk et électronique. Après le succès de leur EP « Nouveau genre », le quatuor — Zoé, Akra, Vic et Art — nous ouvre les portes de la KLON House, leur laboratoire créatif et collectif. Ce disque incarne une explosion d’énergie, de liberté et d’émotions.

JustMusic.fr : Après votre premier EP « Nouveau genre » en 2021, vous sortez enfin votre premier album « KLONBUSTER ». Trois ans se sont écoulés : comment décririez-vous l’évolution du groupe entre ces deux projets ?

KLON : C’est énorme, il s’est passé tellement de choses ! Déjà, je pense qu’on a grandi — on était très jeunes à l’époque de « Nouveau genre ». Et c’est vrai que durant ces trois ans, il y a eu l’expérience de la vie, la confrontation à la réalité… Parce que quand tu grandis, tu prends des trucs dans la gueule que t’avais pas captés quand t’étais petit ! Donc, je pense qu’on est un peu moins naïfs aujourd’hui qu’à l’époque de « Nouveau genre ».

Mais on est aussi plus conscients, et on a gagné en compétences, tu vois, en musique. Mes frères aussi, en production. On a fait de super belles rencontres, qui ont façonné notre son — notamment chez Motorbass. Donc oui, une très belle évolution pour nous.

Enfin, faut dire qu’on a quand même perdu entre-temps deux membres du groupe — un guitariste et notre manager, qui était aussi un pote. Donc, forcément, ça a évolué aussi sur ce plan-là. On est passés de sept à quatre, alors d’un aspect plus collectif — tu sais, avec des gens qui faisaient de la vidéo, d’autres trucs — à un noyau plus resserré, juste nous, les musiciens.
Et ça, ça a quand même pas mal changé notre approche. Il y a aussi ce côté plus live qui s’est développé entre-temps : l’envie de faire un truc plus rock, de lâcher les chiens sur scène. Et c’est vrai que ça a vraiment fait évoluer notre son, ça aussi.

JustMusic.fr : Vous dites que « KLONBUSTER » est le son de la maison, de la KLON House. Qu’est-ce que ce lieu représente concrètement pour vous, humainement et artistiquement ?

KLON : Pour nous, c’est le QG, quoi. C’est là qu’on se rassemble, qu’on se réunit, qu’on échange des idées — où on est entre potes, un peu face à ce monde-là. Comme une meute de loups, ou un équipage de bateau pirate. C’est un peu ça, la maison : notre repaire.

Et le son qui en sort est forcément très organique, très brut. C’est notre laboratoire créatif, un peu comme la Factory d’Andy Warhol à l’époque. Il y a ce côté vintage, cette volonté un peu hippie — ou post-hippie — de vivre et de créer tous ensemble.

JustMusic.fr : Le titre « KLONBUSTER », placé en ouverture, donne le ton de l’album. Pourquoi ce morceau a-t-il été le point de départ, voire la boussole du projet ?

KLON : Comme je te disais, dans notre évolution, je pense qu’aujourd’hui on est aussi un peu plus conscients. On s’est confrontés à des choses qui nous ont pas plu dans ce monde-là — notamment politiquement, ou dans cette société ultra-individualiste dans laquelle, franchement, on ne se reconnaît pas du tout.

Donc, « KLONBUSTER », pour nous, ça a été un peu le point de départ : se dire « non, en fait, on ne veut pas de ce monde-là », et qu’on est prêts à se battre, à « chasser les super-vilains » de ce monde pour en construire un qui nous ressemble davantage.
Mais attention hein — les chasser en musique ! (rires) On reste peace.

JustMusic.fr : Votre son mélange des guitares saturées, des synthés rétro-futuristes et des rythmes rap. Comment est née cette identité hybride, entre pop, punk et électronique ?

KLON : Déjà, de différentes influences. À la base, on était un collectif de rap — c’est comme ça qu’on s’est tous rencontrés, autour du rap. Donc dans ce projet, il y avait cette envie de renouer un peu avec ce truc-là, qu’on avait totalement mis de côté sur « Nouveau genre », où on était beaucoup plus pop.

Le live et le côté rock, en fait, c’est venu naturellement. À force de jouer les morceaux pop qu’on avait sur le premier projet, on s’est rendu compte que sur scène, on avait envie de donner une énergie plus rock. Donc, c’est ça qui a un peu façonné cette nouvelle identité.

Et puis, il y a nous quatre, avec nos influences respectives. On a chacun une culture musicale un peu différente, des univers variés… mais quand on crée ensemble, tout se mélange. En général, on balance des idées comme des jets de peinture sur une feuille, et ensuite on voit ce qu’il se passe. Après seulement, on réfléchit un peu plus à la direction qu’on veut donner, à la texture globale du son.
Mais à la base, tout part d’un truc très libre — il peut y avoir des guitares saturées, des boucles, du rock, de l’électro… C’est vraiment toutes nos influences qu’on lâche, comme ça, sans filtre.

JustMusic.fr : On sent une énergie collective et une vraie envie de liberté dans votre musique. Est-ce que « KLONBUSTER » est une manière pour vous de revendiquer une forme d’indépendance, voire de résistance ?

KLON : Totalement — oui, complètement. « KLONBUSTER » peut paraître un peu caricatural, mais il y a une vraie dimension révolutionnaire. Dire « OK les gars, les filles, on en a marre »… Vous ne trouvez pas qu’on vit dans un monde où certaines idées choquantes se propagent ? Personnellement, ça me choque : on voit aujourd’hui des idées flirtant avec le fascisme prendre de l’ampleur, y compris dans les médias, et sans complexe.

Pour nous, ce disque, c’est une manière de dire « attention » : réveillons-nous. Je pense que beaucoup de gens peuvent s’identifier à ce constat — le monde prend un tournant assez inquiétant que personne ne veut. « KLONBUSTER » est donc un cri fédérateur : si on ne veut pas aller dans cette direction, venez — rassemblons-nous, formons une vraie équipe pour dézinguer ces super-méchants…
Voilà, c’est à peu près ça.

Je pense que l’album « KLONBUSTER », c’est aussi ça : une forme de résistance. Tout a été fait dans une certaine urgence — une urgence de faire de la musique, juste pour qu’elle existe, pour la partager, pour vivre à travers elle. Et puis aussi pour donner un espoir, qui est nécessaire pour nous… qu’on espère pouvoir transmettre aux gens et leur faire du bien.

JustMusic.fr : Parmi les titres marquants, « Disco » a été écrit pendant le Covid, une période sombre. Pourtant, c’est une ode à la joie. Vous aviez besoin de lumière dans ce moment-là ?

KLON : Oui, carrément ! Il y a grave de ça. Même à l’époque, je me souviens : « Disco », c’était pendant la période Covid. Et je pense qu’il y avait ce truc de se dire que quand tout va mal, on se réunit, on se serre les coudes et on essaie de se redonner le sourire entre nous. Le Covid, ça a mis pas mal de choses en lumière : tout le monde s’est renfermé chez soi, on n’avait plus le droit de faire la fête… Pour nous, c’était important de reposer les bases — de rappeler que faire la fête, c’est cool, c’est essentiel. Se rassembler, rigoler, prendre les choses avec légèreté, c’est vital, parfois.

Et puis « Disco », à la base, c’était aussi un clin d’œil à ça : on n’avait pas le droit de faire la fête, mais bon, on en faisait quand même un peu pendant le confinement (rires). On avait un voisin un peu relou, qui appelait souvent la police à cause du bruit. Donc, cette chanson, c’était aussi une manière de le faire un peu râler ! (rires) Sur scène, on joue avec ça : on demande au public de crier le plus fort possible, comme pour continuer le jeu. En effet, « Disco », c’est né du confinement… et un peu pour embêter notre voisin. Je pense que lui, il l’a pas très bien vécu, à côté de nous ! (rires)

JustMusic.fr : « Radical love » évoque une émotion très intime, presque mystique. Comment est né ce morceau et qu’est-ce que cette « radicalité » amoureuse signifie pour vous ?

KLON : En fait, dans notre groupe, tout a toujours été très radical. Tu vois, quand on a commencé la musique, on ne s’est pas juste dit « vas-y, on fait de la musique ». On s’est dit : « vas-y, faut qu’on habite ensemble ». Déjà parce que c’était un rêve pour nous tous — vivre avec nos potes, nos frères, partager ça.

Et on est passés par des phases assez intenses : on se disait « il faut qu’on fasse des pactes d’amitié éternels », qu’on reste ensemble toute notre vie, tu vois, ce genre de trucs.

Donc « Radical », c’est vraiment cette idée-là : celle de l’amour éternel, passionnel, super fort. Un amour indestructible, mais parfois orageux, un peu dur aussi — parce que tu te rends compte qu’habiter ensemble, avoir un projet commun, c’est pas toujours simple. Il y a forcément des tensions.
Mais ce morceau, c’est une façon de dire à quel point c’est précieux. L’amour, c’est fragile, mais ça en vaut tellement le coup, parce que c’est tellement beau.

JustMusic.fr : Vous avez aussi un morceau comme « $tupid punk! » plein d’autodérision. Vous aimez jouer avec les codes, brouiller les pistes… C’est une manière d’affirmer que chez KLON, rien n’est jamais trop sérieux ?

KLON : Oui, en vrai, il y a un peu de ça. J’aime bien l’idée de pouvoir être sérieux sur des choses qui ne le sont pas forcément — de prendre au sérieux des trucs pas sérieux. C’est un peu ce qu’on fait : on s’amuse, mais on se prend quand même au sérieux dans ce qu’on crée. Même quand le fond est léger, il y a toujours une réflexion derrière.

Et en même temps, on garde beaucoup de recul sur nous-mêmes. On ne se prend pas pour ce qu’on n’est pas : entre nous, on se fait surtout kiffer, on se marre. On adore l’humour, le second degré, l’autodérision.

C’est un peu tout ça qu’il y a dans « Stupid punk! » — ce côté un peu absurde, un peu con, mais libérateur. On aime bien dire des conneries, et ce morceau parle aussi de ça : parfois, tu pètes un câble, tu dis des trucs qui dépassent ta pensée, t’es juste énervé sur le moment… et c’est pas grave. On pensait à un pote en particulier, un peu bougon, un peu grognon, mais qu’on adore !
C’est ça l’esprit : un peu punk, un peu stupide, mais plein de tendresse au fond.

JustMusic.fr : Le titre « Skywalker », choisi comme focus track, parle de croire en ses rêves « malgré les obstacles et les sacrifices ». C’est un message personnel ?

KLON : Ouais, c’est clairement le point de départ de notre projet, de tout ce qu’on a fait. « Skywalker », c’était vraiment cette idée de dire : « Vas-y les gars, on est ensemble, on habite ensemble, on fonce, on verra bien ce qui se passe ! » C’était ce truc un peu instinctif, ce saut dans le vide, mais à plusieurs.

Et pour nous, c’était aussi une façon de rappeler aux gens : si t’as envie de faire quelque chose, fais-le. Il n’y a que toi qui peux croire en toi aussi fort que toi-même. Et quand t’es entouré, c’est encore plus simple. Le collectif, c’est ce qui nous a permis, à chacun, de croire en nos rêves.

« Skywalker », c’est donc un peu ça : la force du collectif, le fait d’avancer ensemble, pas chacun dans son coin. C’est aussi une manière de se le rappeler à nous-mêmes — comme une maxime, une boussole, une étoile polaire. Cette idée d’une lumière au bout du tunnel, d’un cap qu’il ne faut jamais perdre de vue. Peu importe les galères, il faut continuer d’avancer, toujours guidés par cette lumière.

JustMusic.fr : Vous avez collaboré avec Randy Merrill pour le mastering, un ingénieur mythique (Lady Gaga, Adele). Qu’avez-vous retenu de cette expérience ?

KLON : C’est surtout avec Motorbass qu’on a eu une vraie connexion de dingue, tu vois — avec Pierre, Antoine et Louise. Eux avaient déjà l’habitude de bosser avec Randy Merrill, donc on s’est dit : « Let’s go ! » On avait une totale confiance en eux, on savait qu’ils maîtrisaient leur truc.

Et puis, on a tout de suite aimé la vibe de Randy — il a une tête un peu de chimiste (rires), ça nous a fait marrer ! Et le fait que ce soit hors de France, c’était aussi cool : avoir une autre oreille, un regard extérieur, quelqu’un qui ne parle même pas français, ça apporte une vraie fraîcheur.
Au-delà de ça, Andy a bossé sur de gros tubes pop, et comme nous, on a aussi cette ambition de faire une musique populaire, ça collait parfaitement à la direction qu’on voulait prendre.

Et puis il y a aussi Alex Gopher, qui a masterisé une bonne partie de l’album. Il a fait un super taf — vraiment top. On est très contents du résultat, on adore.

JustMusic.fr : Sur scène, votre énergie est explosive. Comment transposez-vous cette intensité du live dans vos morceaux en studio ?

KLON : C’est plutôt l’inverse, en fait. Le live nous a inspiré cette intensité qu’on a naturellement. Quand on reprenait nos morceaux — à la base plus chill — sur scène, avec nos instruments, ça devenait tout de suite plus rock, plus fumant.

Alors ça nous a influencés dans ce sens-là : en studio, on s’est dit qu’on devait retrouver cette énergie-là. On a voulu saturer un peu plus les guitares, mettre de la vraie batterie, donner plus de rondeur, plus de puissance. C’est venu du live, et ensuite on a voulu le retranscrire en studio.

Après, c’est un peu technique, mais ouais, c’est exactement ça !

JustMusic.fr : KLONBUSTER se termine sur « All about dance », un long instrumental. Pourquoi avoir choisi de clôturer ainsi, sans voix, presque en apnée ?

KLON : Je sais pas, c’est un délire ! C’est fou parce qu’on a fait ce morceau un peu comme ça, sans trop réfléchir. C’est marrant, parce qu’on avait déjà fait un truc similaire sur « Nouveau genre », avec le titre « Sable d’or », qui clôturait l’EP. À l’époque, on était sept, et on était à fond dans la numérologie : on s’était dit que le morceau devait absolument durer sept minutes !

Du coup, on s’était lancés dans une sorte d’odyssée électronique, un vrai trip. Et là, c’était un peu la même énergie : on voulait terminer le projet sur une note démonstrative, presque cérébrale, avec une production très poussée, très « compositeur », mais toujours en laissant une grande place aux machines.

Oui, il y a vraiment un rapport particulier à la machine. On est tous passionnés de synthés, et sur ce morceau, on s’est vraiment fait plaisir : un vrai tiramisu, un mille-feuille de synthés analogiques ! (rires)

Et puis, il y a aussi ce côté très dance. Faut avouer qu’en soirée, on est souvent les derniers sur la piste (rires). On adore ça. Il y a ce truc presque spirituel : tout devient à propos de la musique et de la danse. Sur un morceau un peu transcendantal comme celui-là, tu te lâches complètement, t’as plus besoin de mots — tu communiques juste par le son, par le mouvement.

C’est aussi pour ça qu’on voulait terminer l’album comme ça : sur une note libre, sans paroles, que chacun puisse s’approprier. Que les gens comprennent ce qu’ils veulent y voir, ce qu’ils veulent y ressentir. C’est une invitation à se laisser aller, à ne plus se prendre la tête, juste à vivre le moment.

JustMusic.fr : Pour conclure, pouvez-vous me donner un mot chacun pour définir votre album ?

KLON : SURKIFFE. ÉLECTRIQUE. EXPLOSIF. ORGANIQUE.

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