INTERVIEW : Rencontre avec Rosenfeld

Rosenfeld a répondu à toutes nos questions à quelques heures de son concert parisien. Il nous a donné rendez-vous dans sa loge à l’Alhambra.

JustMusic.fr : Tu as grandi dans une famille de musiciens, que faisaient tes parents et comment s’est passé ton enfance ?

Rosenfeld : Ma grand-mère m’a appris le solfège et le piano quand j’étais tout petit. J’avais la chance d’avoir un piano dans mon salon donc mon papa m’a également donné des cours. Au début je n’étais pas bon et c’était une torture pour mes parents (rires). Finalement, j’ai réussi de manière autodidacte à rejouer des morceaux que j’aimais bien.

JustMusic.fr : Tu es ensuite allé au Conservatoire National…

Rosenfeld : Oui, j’ai fait dix ans de Conservatoire avant de muer de mes 4 à 12 ans à peu près. Je ne pouvais plus chanter donc j’ai continué avec la guitare avant d’arrêter le Conservatoire, car je me suis rendu compte que ce n’était plus trop mon univers. C’était très formaté et trop codifié, donc j’ai cherché quelque chose qui était plus dans la sensibilité et l’expression de soi.

JustMusic.fr : Tu as voulu faire de la musique pour suivre la trace de tes proches ?

Rosenfeld : Pas du tout (rires), au contraire j’ai essayé de m’en éloigner. Je ne voulais pas être un suiveur et je souhaitais faire mon propre chemin. Je me suis aperçu que lorsqu’on avait un travail, on n’était jamais content et qu’on se plaignait toujours. C’est pour cette raison que je ne voulais pas faire de la musique mon travail pour ne pas finir par la détester (sourire). J’ai fait des études d’ingénieur informatique, ça a duré 7 ans et lorsque je suis entré dans la vie active, au bout de trois semaines je me suis rendu compte que j’avais besoin de me consacrer uniquement à la musique pour me sentir bien.

JustMusic.fr : Tu es un artiste qui évolue dans la musique électronique. Comment as-tu découvert cet univers et qu’est-ce qui t’a plu ?

Rosenfeld : J’aimais beaucoup la musique électronique quand j’étais petit car j’écoutais beaucoup la radio. Ensuite je me suis mis à YouTube et j’ai regardé les chaînes comme « The sound you need » et « Majestic casual ». C’était comme ce qu’on appelle aujourd’hui les playlists, car on pouvait voir des nouveautés tous les jours. Cet univers musical m’apportait beaucoup de joie et j’ai voulu en faire partie car ça m’a inspiré. Je suis un enfant du net donc j’ai voulu faire de la musique et la poster sur YouTube. C’était bizarre à l’époque et c’était difficile de le faire comprendre à mes parents (sourire). Il y a un côté très technique dans l’électro, la recherche du son en plus de la composition et j’aime ça. J’essaie d’y ajouter une écriture pop dans l’exigence sonore de la musique électronique.

JustMusic.fr : Tu as séduit le public avec tes singles mais il y en a un qui se démarque c’est « Do it for me ». Peux-tu me dire quelques mots sur ce succès ?

Rosenfeld : C’est une chanson d’amour que j’ai écrite à 18 ans et c’est très bizarre d’en envoyer une à quelqu’un qui ne nous aime pas en retour. Je trouvais que c’était un monde très compliqué, le fait de se découvrir soi-même à travers l’autre. Je l’ai écrite pour qu’elle soit ambiguë car j’aime que les gens puissent interpréter mes chansons à leur façon. D’ailleurs, la plupart du temps je fais en sorte qu’elle soit non genrée. « Do it for me » a cette ambiguïté, est-ce que c’est juste une relation kinky/BDSM entre deux personnes ou est-ce que c’est quelque chose de plus dangereux dans cette relation de pouvoir qui sort de l’intime. Je voulais présenter cette ambiguïté pour laisser les auditeurs l’interpréter comme ils le souhaitent. Très souvent, beaucoup de gens qui ne l’interprètent pas comme une relation ambiguë, ne sont pas dans des relations où on retrouve ce chantage affectif. C’est un thème que j’aime bien traiter et qui revient dans mon nouvel album. Il est très intéressant et c’est encore plus dans l’actualité aujourd’hui.

JustMusic.fr : Après ton EP « The red room », tu viens de dévoiler ton premier album « Blood & porcelain ».
Tu as dis de cet album que c’était « une approche plus introspective de l’amour, du sexe et du deuil, motivée par le doute et des questions sur [sa] propre identité ».
Peux-tu me présenter ce disque et me raconter la naissance des morceaux ?

Rosenfeld : C’est une façon d’exprimer un questionnement interne que j’aime en tant qu’artiste ou en tant que Simon Rosenfeld, et je le fais passer par ce personnage fictif qui est Rosenfeld. Je transpose mes doutes à travers lui, une personne très sexe, évocateur et sombre. L’album est une crise identitaire à 25 ans (sourire), avec le personnage qui est créé de toute pièce. Est-ce que je dois l’incarner complètement ou est-ce que je dois laisser transparaître mes faiblesses ou mes émotions, au risque de me faire attaquer directement ? Il se veut très homme, très masculin et très fort, mais ses relations avec les femmes vont être difficiles et fausses. Il va essayer de travailler sur lui mais en vain, car on voit dans l’album qu’il prend de mauvaises décisions… Il fait un travail personnel mais ça ne fonctionne pas et il se retrouve en position d’infériorité dans la deuxième partie du disque. Cela va le mener à sa déchéance… Il existe une autre fin qui dit qu’il va arriver à se confronter à cette fausse image qu’il a créé, et un seul va survivre… J’appelle ça son pèlerinage interne. C’est en se questionnant et en s’affrontant lui-même et non pas les autres qu’il va trouver la paix. Il en ressort blessé car ce n’est pas simple, mais il va finir par devenir ce qu’il a besoin d’être.

JustMusic.fr : Pourquoi l’avoir appelé « Blood & porcelain » ? Il y a une chanson qui s’appelle « Porcelain » mais il n’y a pas de titre qui s’appelle « Blood »…

Rosenfeld : Oui c’est vrai (sourire). Il s’appelle comme ça car c’est un album en deux parties, la première qui est ce personnage qu’il a créé qui est beaucoup plus dur et accessible. Et la seconde qui est plus dans la recherche de soi et qui est plus difficile à accepter.

JustMusic.fr : Tu seras ce soir en concert à l’Alhambra, cette date était à la base prévue à la Boule Noire et elle se déroulera finalement dans une salle plus grande. Il y a des fans qui attendent depuis ce matin, est-ce que tu t’attendais à cet engouement de la part du public ?

Rosenfeld : Maintenant oui, mais il y a quatre mois non (sourire). La Boule Noire a été SOLD OUT très rapidement et je ne me doutais pas qu’il y aurait un tel engouement. Je sais que des gens viennent du Mexique et du Brésil donc ça me fait super plaisir. Au début ma musique était très virtuelle et je suis ravi de pouvoir enfin rencontrer les gens. J’essaie de m’y préparer mais on n’y croit jamais vraiment avant d’y être (sourire). Je vais commencer à stresser quand je verrai la salle pleine (rires).

JustMusic.fr : C’est comment Rosenfeld sur scène ?

Rosenfeld : C’est très rock ! Lorsque je me suis imaginé sur scène je voulais avoir de très belles tenues, que ce soit extravagant sans être vulgaire. Ma grande inspiration est Freddie Mercury et j’aimerais avoir sa prestance. Les tenues sont très rouges, très saturées même si mon univers est assez sombre. Ce n’est que le début donc j’espère que je vais m’améliorer avec le temps. Je dirais que je suis à 9,9 et j’espère que la prochaine fois ce sera 9,99 (sourire). Je te disais que c’est rock, car je chante et je m’accompagne à la guitare.

JustMusic.fr : Tu es seul sur scène ?

Rosenfeld : Je suis accompagné d’Ulysse qui est un ami très proche qui a co-produit beaucoup de chansons de l’album à mes côtés. Il a son propre projet « Oscen » et il m’a aidé à tout finaliser. Je suis très heureux qu’il soit avec moi sur scène et il jouera du piano sur presque toutes les chansons.

JustMusic.fr : Quel est ton coup de cœur musical du moment ?

Rosenfeld : Je suis très rétro et j’écoute beaucoup Radiohead (sourire). En ce moment j’écoute énormément de musique française, j’aime beaucoup Solaan et Yamê que j’ai découvert avant qu’il perce. La première fois que je suis tombé sur lui, je savais que ça allait marcher et six mois après il a commencé à cartonner. Comme j’aime la chanteuse Banks, je trouve que l’univers de Solaan lui ressemble même si c’est plus doux.

JustMusic.fr : Pour terminer, que peux-tu ajouter pour donner envie au public d’écouter ton album « Blood & porcelain » ?

Rosenfeld : C’est un album dans lequel les gens peuvent se reconnaître. En tout cas, il s’écoute facilement et on peut vite s’y connecter. Je pense que si vous aimez Daft Punk et Radiohead, cet opus est pour vous (sourire). Si vous avez également bien aimé « Lost in the fire » de Gesaffelstein feat. The Weeknd, ça s’adresse aussi à vous !

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