INTERVIEW : Rencontre avec Marvin Jouno

Marvin Jouno est un artiste talentueux que nous soutenons depuis son premier album « Intérieur nuit ». Il vient de sortir « Sur Mars », un deuxième opus plus que réussi. Une fois de plus, il a répondu à toutes nos questions avec sympathie et sincérité.

JustMusic.fr : Pour commencer, peux-tu me faire un petit bilan de ton premier album « Intérieur nuit » ?

Marvin Jouno : J’ai eu de très belles surprises avec « Intérieur nuit ». Je suis arrivé un peu sur la pointe des pieds car j’avais tout à apprendre en terme de promo et de live. J’ai appris un métier que je ne soupçonnais pas. J’ai eu un joli accueil médiatique et une belle tournée avec des dates différentes, des premières parties, des dates en tête d’affiche à Paris, en province mais aussi à l’étranger. J’ai aussi eu l’occasion de me produire dans de très beaux festivals. J’ai eu l’occasion de voyager à nouveau et c’était très sympa (sourire). J’ai également pu rencontrer mon public et me rendre compte que mes chansons pouvaient trouver un écho chez les autres. Je pense que ça m’a marqué pour l’écriture du deuxième, car j’avais besoin que mon écriture soit plus perméable, moins hermétique. Je voulais être plus généreux (sourire).

JustMusic.fr : Ton nouvel album « Sur Mars » est sorti le 25 janvier dernier et les débuts sont très prometteurs. Tu l’as appelé comme ça car tu dis que tu y étais pendant ces trois dernières années… Peux-tu m’en dire plus ?

Marvin Jouno : J’ai vécu trois années particulières et j’ai eu parfois l’impression d’être sur une autre planète (sourire). Je me suis mis à la place d’une sorte de colon qui serait parti sur Mars en premier et qui aurait rencontré une terre un peu hostile. La vie là-bas est très aléatoire et c’est un voyage périlleux. Je l’ai imaginé en solitaire… Sur Mars est une métaphore pour dire l’indicible car j’ai vécu dans une sorte de défoulement profond et total pendant trois ans, je me suis figuré ce voyage pour faire passer la pilule (rires).

JustMusic.fr : Les thèmes de l’album sont assez sombres, pourquoi as-tu voulu te livrer autant ?

Marvin Jouno : C’est bizarre car j’ai un rapport à la pudeur assez particulier. Je suis réservé, très timide et pudique… Au départ, j’étais mal à l’aise sur scène mais à force je me suis révélé et j’ai trouvé le personnage que je voulais être. Je ne souhaitais pas être sur scène et subir. J’ai mis une espèce de cape de super pouvoirs en plus. J’avais envie d’être généreux, de me dévoiler et la première motivation quand j’écris une chanson est de le faire pour moi. Je prends un problème quelque part et j’essaie de l’exprimer pour le faire sortir.

JustMusic.fr : Tu dis que c’est un album de deuil concernant tes histoires d’amour et le décès de ta maman. Mais tu as mis fin à une histoire d’amour de 10 ans et tu es parti… Pourquoi ce choix, tu n’as pas préféré te battre que de provoquer ce « deuil » ?

Marvin Jouno : J’ai quitté mon domicile conjugale et mon histoire longue et belle, trois semaines avant la sortie d’ « Intérieur nuit ». Par la suite, j’ai eu une espèce d’amour longue distance qui n’a pas pu ce concrétiser. J’en ai provoqué une et j’ai subi l’autre, et j’ai vécu ça comme des petits deuils. Puis, j’ai été rattrapé par le vrai deuil, celui qui fait vraiment mal… Ensuite, j’ai été à la dérive pendant deux ans et demi… J’ai vécu un peu partout et c’était un peu n’importe quoi. La sortie de mon premier album a été particulière car je recevais beaucoup sur le plan artistique, mais sur le plan personnel, c’était une catastrophe (rires).

JustMusic.fr : Tu as donc beaucoup voyagé (Saint-Petersbourg, Moscou, Tokyo), et tu étais seul pendant 45 jours. Comment as-tu choisi les destinations et à quel moment cela t’as inspiré pour écrire tes nouvelles chansons ?

Marvin Jouno : J’avais ce voyage en tête depuis que je suis ado et je me suis toujours dit que je prendrais le transsibérien un jour. Je suis parti de Brest, j’ai voulu partir de l’Atlantique pour arriver vers le Pacifique. Je l’ai fait sans prendre l’avion pendant 45 jours. Pour moi, c’était une parenthèse et ça ne m’a pas inspiré pour l’album, ou alors inconsciemment. J’avais déjà fait une session en studio, j’ai fait mon voyage et ensuite j’ai recommencé à travailler sur l’album. Evidemment, ça l’a nourri mais pas concrètement car je n’ai pas écrit une seule ligne d’une chanson pendant mon voyage. Je voulais me retrouver moi-même et pas l’auteur/compositeur car je commençais à être fatigué. J’avais besoin d’une pause…

JustMusic.fr : Les sujets sont sombres mais même si on reconnaît ta touche par rapport à ton premier album, les sons de tes nouveaux titres sont quand même plus rythmés. Comment ça se fait ?

Marvin Jouno : Il y a quelque chose de plus assumé car je me présentais avec mon premier album, et j’ai certainement progressé en trois ans. J’ai observé la réaction du public en live et j’ai vu que « Love letter » et « Larme blanche » étaient des morceaux qui faisaient bouger n’importe quelle foule dans n’importe quel concert. Il y avait une espèce d’évidence et c’était mes passages préférés. Comme je n’écoute pas beaucoup de chanson française, que je suis plus dans l’électro et le hip/hop – j’avais déjà commencé dans « Intérieur nuit » – j’ai voulu aller plus loin. Je travaille toujours avec la même équipe Agnès Imbault et Angelo Foley, et cette fois-ci on a gardé plein d’éléments de nos maquettes. Dans des titres comme « Danse ! » ou « On refait le monde » il y avait déjà l’ossature qui existait. Sur le premier album, on a fait plus de piano/voix, je pense que tous les trois ont a aussi beaucoup progressé durant trois ans.

JustMusic.fr : Dans le deuxième extrait « Danse ! », tu dis « La mort sait pas danser, alors ce soir je danse ça m’évite d’y penser ». Peux-tu me présenter ce titre ? Est-ce que tu danses vraiment pour oublier tes soucis ? 

Marvin Jouno : Ce sont des souvenirs de tournée car à chaque concert on a beaucoup dansé et j’ai adoré ça. La composition du deuxième album s’est faite suite à la tournée et comme j’ai été très isolé dans un hameau en Bretagne, j’ai repensé à tous ces moments. J’ai aussi un rapport très particulier avec la danse car j’ai toujours voulu être un danseur même si je suis mauvais (sourire). J’aurais aimé avoir une carrière de danseur classique et j’adore ça ! Je danse à ma manière et en live, j’ai une gestuelle très particulière car c’est une espèce de lâcher prise. Même si je suis dans la retenue dans la gestion de mon corps, la danse est un moment de libération. Pendant tous ces mois de deuil, la danse était pour moi une façon un peu d’oublier la mort.

JustMusic.fr : En parlant de passion, à part la danse tu es un passionné de cinéma. On retrouve toujours des touches cinématographiques dans certains titres, alors as-tu des projets cinématographiques ?

Marvin Jouno : J’aimerais beaucoup car je tourne autour du pot depuis 15 ans. J’ai fait des études de cinéma et je suis sorti de l’école en 2005, donc il faut que je m’y mette. Il faut que je finalise un maudit scénario de court-métrage pour commencer. C’est noté en grand sur mon bureau (sourire) ! Je suis très impliqué dans le graphisme, la photographie, les clips… sur mon projet musical et je rêve de faire un tas de choses afin de monter ma petite histoire.

JustMusic.fr : On entend aussi des sons que tu as enregistré sur ton téléphone dans l’avion ou dans la rue… Quand tu l’as fait, est-ce que tu pensais déjà à les mettre dans des chansons ?

Marvin Jouno : Pas toujours… J’étais chez Agnès un soir et j’entends un mec qui hurle et comme j’ai trouvé ça marrant, je l’ai enregistré. Je l’ai intégré plus tard sur le titre « Danse ! » car j’ai voulu que l’album soit une vraie bande son avec des choses de la vraie vie. Il était hors de question de refaire un film, j’ai voulu que l’album se suffise et qu’il soit déjà un petit objet cinématographique.

JustMusic.fr : L’album se termine avec un très beau titre « Décembre à la mer » concernant le décès de ta maman. Un petit mot sur ce titre ?

Marvin Jouno : C’est la chanson qui a été la plus compliquée à faire (sourire), j’ai dû avoir plusieurs versions du texte avant de tout remplacer pour le finaliser. J’avais cette chanson dans un tiroir depuis un an et je ne la trouvais pas à la hauteur car l’enjeu était de rendre un dernier hommage à ma maman. Je l’ai faite écouter à Angelo, on était en cession studio où il a tout arrangé en un temps record et ma voix qui était aussi dans l’émotion. C’est quasiment un one shot car on a justement voulu garder cette émotion. Lorsque je me suis retourné, tout le monde était en pleur dans le studio…

JustMusic.fr : Tu seras de retour sur scène à Paris au Café de la Danse le 12 mars. Comme on vient de l’évoquer, tu as fait de nombreux concerts, des festivals, des premières parties exceptionnelles dont celles de Zazie. Quels souvenirs en gardes-tu ?

Marvin Jouno : Au début, ce n’était pas trop ma tasse de thé et au final, c’est devenu mon endroit préféré sur Terre. C’est une grosse dose d’amour qu’on reçoit et une grosse dose d’adrénaline. J’ai fait ce deuxième album pour revivre ça, car souvent en live, on sait enfin chanter nos chansons (sourire). J’ai hâte d’être au plus juste de l’interprétation sur scène.

JustMusic.fr : Tu auras 35 ans le 21 février prochain, et tu as dit que 35 ans c’est à peu près la moitié de la vie d’un homme. Maintenant que tu as exorcisé tes démons avec ce nouvel album et que ça va mieux, comment imagines-tu le reste de ta vie ?

Marvin Jouno : Il va me falloir la santé et je ne fais pas grand chose pour ça (sourire). Il faudrait que je continue de jongler entre musique, photo et cinéma, voire aller plus loin. J’espère que j’aurais cette espèce de courage et de modestie à continuer à essayer même si je me prends des claques. Je me pose beaucoup de questions et j’espère encore avoir l’envie et surtout des choses à raconter (rires).

JustMusic.fr : Pour terminer, que peux-tu ajouter pour donner envie au public d’écouter ton nouvel album ?

Marvin Jouno : Ce nouvel album est plus authentique, plus singulier et j’ai l’impression que quand on l’aime on peut ressentir les tempêtes que j’ai vécu. C’était mon objectif de présenter aux gens, une tempête, une sorte de coup de poing (sourire).

Retrouvez Marvin Jouno sur Facebook, Twitter et Instagram.