Bastian Baker, fidèle de JustMusic.fr, nous a accordé de nouveau de son temps, pour revenir sur son actualité musicale, sortie d’album, concert, et ce, toujours sans langue de bois.
JustMusic.fr : La sortie mondiale de ton album « Facing Canyons » est annoncée pour le 30 septembre. En quelques mots, peux-tu nous décrire cet opus ?
Bastian Baker : C’est le troisième album studio que j’enregistre. Il est plus folk que les autres et pour la première fois j’y ai inclus des instruments comme le banjo, la mandoline, l’harmonica, ainsi que des cuivres, qui rendent très bien en live. C’est un album hyper personnel, authentique comme un chanteur auteur devrait le faire puisque je parle de la vie, du quotidien et de tout ce que chacun peut ressentir. Je passe par des thèmes tels que l’amour, première fois que je fais presque que des chansons d’amour. Avant, on me posait souvent la question, de savoir pourquoi je n’en faisais pas plus que ça, et aujourd’hui c’est fait. Il y a aussi des thèmes sur la religion, le temps qui passe, un peu de questionnement, de philosophie, on passe en fait par tous les états d’âmes dans cet album.
JustMusic.fr : En es-tu plus fier que les autres albums ?
Bastian Baker : Tu es à chaque fois plus fier de ton nouvel album et heureusement, sinon ce serait dur de partir en promo (sourire). Je pense que c’est un album qui est bien dans la continuité des autres, avec un petit virage folk que je trouvais nécessaire. Il est sorti dans quelques territoires, un peu avant cette sortie mondiale, comme en Suisse, Canada et au Japon, et du coup j’ai eu l’occasion de le défendre déjà pas mal de fois en live. Et c’est vrai que c’est très agréable, car c’est vraiment en synchronisation avec ce que je vis maintenant.
JustMusic.fr : Il y a une chanson qui retient plus particulièrement notre attention « Charlie from Sydney », au sujet des attentats. Quel message souhaites-tu passer à travers ce titre ?
Bastian Baker : Dans toutes les précédentes interviews, on a essayé de me faire dire que c’était une chanson politiquement engagée alors que pas du tout, puisque je ne critique aucune politique, ni aucun gouvernement. La seule conclusion qu’on peut faire de ces attaques, de ces événements, c’est que ce sont des actes isolés, sans aucune réflexion, aucune volonté de changer le monde pour quelque chose de meilleur. Et c’est ce que je dis dans cette chanson, que je suis juste triste et désolé de la manière dont ça se passe, hyper violente, qui touche des civils innocents. Et c’est vrai que ces événements dramatiques m’ont touché, surtout qu’à chaque fois, j’étais dans un contraste total, car pendant que ces attaques se déroulaient, j’étais un peu au sommet de ma vie, j’étais émotionnellement bien. Une fois, j’étais à Las Vegas dans le lounge de l’aéroport à regarder cette espèce de cinglé à Sydney, dans ce café, avec ce drapeau noir, donc forcément ça te donne un coup. Et la deuxième fois, l’anecdote est assez troublante pour la raconter, puisque j’étais en Islande en train de composer la mélodie du premier verset de cette chanson « Charlie from Sydney », quand mon assistante est venue en trombe dans ma chambre en me disant « Tu as vu ce qu’il se passe à Paris ? ». Les images avaient l’air d’être terribles et j’ai terminé cette chanson à ce moment là. C’était censé être un titre hommage, en disant que les événements passés avaient été l’apogée de la violence et qu’on allait partir sur quelque chose d’autre. Malheureusement, les mois qui ont suivi ne m’ont pas donné raison et c’est déplorable. Je raconte aussi qu’on ne peut même pas être énervé, mais que je suis triste, que je pleure mais qu’en soi je vais bien. Cette chanson nous pousse également à continuer à vivre comme les français le font ici, et de ne surtout pas céder à une espèce de stigmatisation, ni à une peur inutile.
JustMusic.fr : D’ailleurs, à part ce titre plein de sens pour nous français, est-ce qu’il y a une chanson qui te tient à cœur dans cet opus ? Et pour quelles raisons ?
Bastian Baker : Elles me tiennent toutes à cœur, ce sont toutes mes bébés car elles décrivent toutes un moment de ma vie, ou une émotion que j’ai ressentie. « Ain’t no love » est une chanson que j’adore jouer en live car c’est peut-être la plus folk, la plus adaptée à Nashville, montrant un peu le chemin que je prends et décrivant un peu ma manière de penser. Cette deuxième phrase du couplet « There ain’t no religion, if you believe in people » a été dure à sortir pendant quelques semaines, elle restait coincée au fond de la gorge, car elle a pris une autre valeur à mes yeux du fait de ces événements terribles. Il y a aussi le fait que Robert Francis, mon artiste préféré, a fait mes premières parties sur la tournée Suisse, et c’était sa chanson préférée. Et plusieurs fois, il est venu faire des petits solos en chant et à l’harmonica sur scène avec moi, j’étais assez proche de l’extase dans ces moments là, alors ce titre a une valeur particulière pour moi.
JustMusic.fr : Sur ta page Facebook, tu as voulu partager les circonstances d’écriture de chaque titre. Pourquoi avoir voulu faire cette démarche ?
Bastian Baker : Je ne l’ai pas fait immédiatement après la sortie car pour moi le but n’était pas non plus de mettre un cadre autour de chaque chanson, puisque j’aime aussi laisser leur libre interprétation aux personnes. J’ai juste commencé à écrire ces textes, parce que je me suis dit qu’en tant qu’auteur-compositeur-interprète, la musique a bien sûr une importance, mais chez moi le texte est à 50% au moins autant important. J’avais donc envie de partager l’histoire, mon point de vue, et d’après les retours que j’en ai eu, cette action a été appréciée.
JustMusic.fr : T’es-tu plus livré ?
Bastian Baker : Oui, chaque album devient aussi une thérapie en quelque sorte. C’était même presque une préparation aux interviews, en décrivant pour chaque chanson le message, l’état d’esprit dans lequel j’étais, comment je l’ai écrite, pour être le plus complet possible. Ensuite, j’ai pris du recul sur les titres, comme pour « I want you », où je me moque grossièrement de moi-même, et quelques mois après c’était encore plus flagrant à quel point je me trouvais ridicule. Quand tu y repenses, tu te rends compte que les chansons travaillent, évoluent dans le temps.
JustMusic.fr : Justement, du coup, ces chansons sont plutôt des conseils pour les autres afin de relativiser ou une thérapie pour toi sur des expériences vécues ?
Bastian Baker : Ce sont les deux, avec une perception différente dans le temps, qui aide à être serein, et globalement à pouvoir regarder les choses avec clairvoyance et lucidité. L’album pousse à voir au-delà du temps, des minutes qui passent, comme le titre de l’album précédent « Too old to die young », qui était déjà relié à cette réflexion sur l’espace temps. C’est ma manière à moi d’être paisible, en harmonie (sourire).
JustMusic.fr : Depuis le début de ta carrière, ce sont tes titres que tu interprètes, mise à part la reprise « Hallelujah » bien sûr, ou en collaboration avec d’autres artistes. Serais-tu prêt à enregistrer une chanson totalement écrite et composée par quelqu’un d’autre ?
Bastian Baker : Il ne faut jamais dire jamais, mais ce n’est pas quelque chose qui me fascine pour l’instant. Je sais que la culture française en est très encrée avec séparément des auteurs, des compositeurs et des interprètes, alors qu’en Suisse, pays plus petit, nous grandissons plus avec l’idée de tout faire nous même. Je ne connais pas d’artistes en Suisse qui se font écrire des titres par d’autres. De temps en temps, il peut effectivement y avoir des collaborations, mais une chanson délivrée dans sa totalité où tu chantes deux heures en studio et que l’ingénieur de son fixe le tout, ce n’est pas vraiment dans ma culture. Mais évidemment, si un jour on me propose une chanson qui me parle et qui peut avoir du potentiel, je ne suis pas borné, je ne dirai pas non.
JustMusic.fr : Côté scène, qu’est ce qui a changé avec cet album ?
Bastian Baker : L’ajout des cuivres, le fait que tous mes musiciens sont devenus multi-instrumentalistes pour qu’on puisse assumer ce show à fond, comme sur l’album. Sur certaines chansons, mon guitariste a le banjo devant, la guitare dans le dos, et suivant le couplet ou le refrain, il les fait tourner. Mon trompettiste fait de la mandoline, ma choriste du shaker, du violon et de la flûte irlandaise. C’est un show dédié vraiment aux festivals ou aux salles de plus de 1000 personnes. A Paris, nous ne pourrons pas le faire, mais en soit les chansons ont toutes été écrites en guitare voix et j’aime bien les concerts intimistes, où l’interaction avec le public est là et où je peux raconter des petites anecdotes.
JustMusic.fr : Justement, tu seras à Paris, le 09 novembre au « Théâtre les Etoiles ». Depuis presque 2 ans, tes fans français ne t’ont pas vu. Appréhendes-tu ces retrouvailles avec eux ?
Bastian Baker : J’appréhende beaucoup plus de choses que les retrouvailles, car je suis toujours content de jouer devant ce public, qui, pour certains d’entre eux, me suivent depuis le début, malgré mon absence. Je m’en réjouis, et dans cette tournée, il n’y avait pas de raison de ne pas inclure la France, en commençant par Paris. Plus tard, j’aimerais aussi jouer ailleurs, en province.
JustMusic.fr : Ta musique dépasse largement les frontières d’Europe, puisque tu es allé récemment au Japon. Après avoir voyagé un peu partout dans le monde, y a-t-il un public qui t’a plus étonné qu’un autre dans son accueil ?
Bastian Baker : Pour chaque soir, tu n’es jamais dans la certitude, tu dois adapter ta setlist, tu es plus en moins en forme. J’ai fais plus de 600 concerts, dans 35 pays différents ces cinq dernières années, donc c’est vrai que j’ai vu du monde et du pays ! Mais un des accueils qui m’a le plus marqué, c’était en Algérie, de la folie. Nous avions une introduction un peu épique, devant 2000 personnes dont l’engouement était hallucinant, et pour un premier concert ça fait vraiment plaisir. Il y a eu aussi la Corée du Sud, pour un festival dans un stade de 12 000 personnes, avec de la pyrotechnique, où c’était vraiment cool (sourire).
JustMusic.fr : Avec tous tes déplacements, tu passes de scènes immenses à des salles plus intimistes et inversement. Comment gères-tu cette différence, due souvent à ta popularité ?
Bastian Baker : La Corée du Sud représente justement le meilleur exemple. Un soir, tu te retrouves dans un stade à Séoul avec ces 12 000 personnes en délire, et le lendemain soir, pour une radio, je jouais à Hambourg devant 300 personnes assises de plus de 60 ans, un contraste génial (rires). Mais ces situations ne m’ont jamais posé de problème d’adaptation, je suis conscient d’avoir les deux aspects, et c’est pour ça que je continue à autant travailler. Avec le groupe, on avait ouvert pour Shania Twain au Canada, et parfois après les concerts, on se retrouvait dans des bars de la ville, à remplacer les musiciens pour improviser un mini concert. Du moment que je joue, que ce soit devant 10 000 ou 2 personnes, je suis là pour faire passer du bon temps au public, faire découvrir ma musique. Je suis conscient d’avoir la chance de jouer dans des grosses salles, et quand ce sont des petites salles, je suis tout aussi conscient que c’est de là où je viens.
JustMusic.fr : Quel regard as-tu vis à vis du marché du disque actuel ?
Bastian Baker : Effectivement tout le monde a peur, puisque par rapport aux années précédentes, nous avions à chaque fois des changements de format, comme les 33 tours, mini-disc, cds etc, mais avec des modèles de vente qui restaient les mêmes. Alors qu’aujourd’hui, nous sommes dans un changement global de vente et de support. On ne gagne pas notre vie en ayant 200 000 écoutes sur les plateformes. Maintenant tu as plus de chances de te faire découvrir, mais y a un plus vaste choix de musique. On verra ce qu’il se passera dans les mois à venir, car il y a des stratégies à redévelopper sur les plateformes et réseaux en ligne.
JustMusic.fr : Avec la sortie de « Facing Canyons », tu postes au fur et à mesure une sublime session acoustique enregistrée en Islande sur tes pages officielles. Raconte-nous un peu ce voyage et les circonstances de ces lives ?
Bastian Baker : Mon management allemand en a eu l’idée. A la base, nous étions partis tourner un clip, de toute beauté avec ces paysages islandais, pour « Ain’t no love », qui sortira dans les semaines à venir. Et en marge de ce tournage, nous avons profité de ces endroits magnifiques pour avoir d’autres images sur d’autres titres.
JustMusic.fr : Pour finir, que dirais-tu à ton public pour les faire venir à ton prochain concert parisien ?
Bastian Baker : Commencez par acheter un billet, sinon c’est compliqué (rires). Allez voir mes vidéos, si vous aimez ma musique et ma gueule, et que vous n’avez rien à faire ce soir là, il faut venir. Nous allons passer un bon moment, je m’en réjouis, et puis je jouerai tout le nouvel album et on verra à la main levée pour faire des autres titres qui feront plaisir. Le but c’est que le public reparte content, surtout s’il a une chanson préférée, si je m’en souviens, j’essaierai de la jouer.
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Caroline HULIN