INTERVIEW : Rencontre avec Marc Lavoine (Les souliers rouges)

Les Souliers Rouges JustMusic.fr

Marc Lavoine présente le conte musical « Les souliers rouges » et nous l’avons rencontré à l’hôtel « Le Roch » lors d’une grosse journée de promotion.

JustMusic.fr : On vous retrouve dans « Les souliers rouges » donc pouvez-vous m’expliquer comment vous êtes arrivé sur ce projet ? Par la même occasion me dire quelques mots sur Fabrice Aboulker avec qui vous travaillez depuis vos débuts ?

Marc Lavoine : C’est un projet que Fabrice Aboulker m’a apporté. On écrit des chansons ensemble depuis 30 ans et on se connaît depuis 1978. Notre histoire est longue et notre amitié est très profonde. A chaque fois on a réussi à créer des chansons émouvantes et je m’en aperçois dès que je chante mes titres devant des gens qui me font l’honneur de venir m’écouter et me voir. Un jour Jean-Paul Goude et Victor Bosh qui sont amis (il a produit « Kirikou » et « Notre-Dame de Paris » et il a une salle de spectacle à Lyon) sont venus nous voir. Avec Fabrice nous sommes des admirateurs de son travail depuis des années. Il a proposé « Les souliers rouges » à Fabrice et il est venu m’en parler. Un long travail de 7 ans a alors commencé jusqu’à la dernière année de production en studio. C’était un travail d’introspection, de conversation, de rencontre… en 7 ans il s’est passé énormément de choses et tout ça a nourri ce que vous pouvez entendre aujourd’hui.

JustMusic.fr : Pourquoi avez-vous choisi Coeur de Pirate et Arthur H ? Et pourquoi vous êtes-vous attribué le rôle de l’auteur ?

Marc Lavoine : Je ne savais pas si j’allais me donner un rôle car tout dépendait de la forme. Un jour avec Fabrice on s’est posé la question de savoir quelle forme on voulait donner au projet. C’est à ce moment qu’on a trouvé les pianos, les cordes, les guitares et qu’on a abandonné les paternes de batterie et les synthétiseurs et qu’on a fait que la musique soit intemporelle. Lorsque j’ai entendu Eleanor Rigby sur le vinyle de l’album « Revolver » avec les cordes de George Martin, ça m’a inspiré pour la direction musicale qu’il fallait qu’on prenne. Puis, j’ai écouté Simon and Garfunkel avec le titre « Bridge over troubled water », où l’on entend des guitares, des voix mais pas de batterie. Ensuite sont arrivés les vents. Ma fille de 18 ans et mon fils de 30 ans qui est plus hip-hop ont écouté les titres sans les batteries et ils ont commencé à aimer. Je me suis dit qu’en les enlevant cela pouvait réunir les gens de tous les âges parce qu’on les avait déshabillés et habillés autrement.
Au début je voulais jouer le rôle du chorégraphe donc j’ai cherché la personne qui pouvait jouer celui de l’auteur. J’ai été vers le monde du classique mais je me suis rendu compte que les gens du classique avaient un planning très chargé et que ça n’allait pas forcément pouvoir se faire. J’ai donc décidé d’achever mon travail avant d’aller le proposer aux autres.
Nous avons été au bout du travail et de la production à quelque chose près et avec Sylvain Taillet mon directeur artistique pour le son, on a commencé à chercher une femme qui était en même temps une diva mais aussi une personne crédible en tant que danseuse. Il m’a proposé Béatrice de Coeur de Pirate. J’avais déjà chanté avec elle pour Haïti au Zénith le titre « Le paradis blanc ». Je m’étais rendu compte que lorsqu’elle chantait elle jouait chaque syllabe comme une actrice, qu’elle propulsait les phrases à sa façon et cela me plaisait. Je lui donc envoyé les chansons, elle était en tournée à Los Angeles et après l’écoute de 10 titres elle a accepté. Ensuite j’ai commencé à cherché le troisième rôle et c’est une fois de plus Sylvain qui a proposé le nom d’Arthur H. J’avais adoré son duo avec Lou Marco et je savais que sa voix allait être compatible avec celle de Béatrice. On a des registres identiques mais nos voix fonctionnent ensemble. Je le pense donc maintenant comme l’album vient de sortir, j’espère que le public aimera les chansons comme je les aime. J’aurai peut-être une bonne nouvelle dans une semaine, peut-être pas, mais c’est le jeu (sourire).

JustMusic.fr : Quelle est la différence entre écrire des chansons pour vos propres albums et pour un conte musical ?

Marc Lavoine : L’engagement est différent car là j’essaie de trouver une structure générale avec des langages, des personnages qui se croisent, qui s’entrecroisent, qui vivent ensemble, qui se détachent, qui s’aiment, qui se désaiment, qui pleurent, qui se tuent, qui se sacrifient… c’est un personnage que j’écris comme le scénario par exemple que j’ai fait à partir de mon livre. Il faut que ça reste un disque, des chansons, mais ce n’est pas moi… Il a des liens avec moi mais il est différent car il vit une histoire qui est le conte d’Andersen. Jean-Paul Goude ce n’est pas n’importe qui donc si on a travaillé 7 ans c’était pour rendre hommage à la confiance qu’il nous a donné.
Mon prochain album solo est enregistré et je vais le finaliser jusqu’au moment de sa sortie. C’est un travail personnel et je prends mon propre risque. Là, Francis est engagé avec moi, j’ai voulu faire d’autres choses comme du théâtre, des films, un livre, un conte musical… et là à 54 ans il est temps de revenir. Si j’ai fait ça ce n’est pas par hasard car je sentais que je pouvais m’installer dans un métier alors que je voulais rester dans le travail. Ce n’est pas de la prétention mais de l’humilité car il faut être capable de remettre son titre en jeu. J’avais envie de nouveaux partenaires pour respirer ! Il se passe des choses dans la vie des gens, on perd des gens proches… Le personnage principal de la vie que je mène depuis l’âge de 16 ans quand j’ai fait « Pause café », c’est le public et je l’aime ! Il ne m’appartient pas, je veux juste à chaque fois essayer de faire quelque chose qui trouve le lien entre nous. Un lien que je respecte, qui m’est infiniment précieux et presque indispensable. Je reviens donc l’an prochain avec un nouvel album et une nouvelle tournée.

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JustMusic.fr : La danseuse tombe amoureuse et meurt. Et vous que choisiriez-vous, l’amour ou la gloire ?

Marc Lavoine : J’ai déjà fait mon choix et je crois que les gens à qui je m’adresse sentent que ce n’est pas la célébrité. Mon disque d’or je n’ai pas voulu le garder donc je l’ai offert à ma mère, et pour elle le plus important était que je me réalise. Que je ne trahisse pas les valeurs et les principes de notre famille. Des gens qui travaillent et qui fabriquent la vie de tous les jours dont je fais partie. On ne choisit pas d’être artiste, ça vous arrive comme l’amour. Après il faut construire et créer une famille, avoir un rapport collectif mais aussi individuel avec nos enfants, essayer de comprendre ce qui nous échappe, qu’ils nous apprennent autant qu’on essaye de leur apprendre… Je ne suis pas là pour créer de l’illusion et sortir des colombes de mes manches. Je suis là pour être avec les gens et j’ai trouvé ce vecteur des mots, de la chanson, du cinéma, du théâtre, pour essayer d’être en communication permanente avec l’humanité qui m’intéresse. Ce qui me permet à côté à travers les différentes associations d’avoir eu un parcours qui ne m’a jamais fait quitter la Terre dont je suis le fils. J’apprends beaucoup de choses, je suis plus grand à chaque fois que je rentre dans une galerie d’art, que je vois un bon film, que j’écoute des belles chansons, quand je rencontre des gens de ma société civile celle dont je suis issu, ce n’est pas la mienne mais j’appartiens à elle.

JustMusic.fr : Les 15 titres de l’album sont la B.O. d’un film qui n’existe pas, donc sous quelle forme allez-vous le présenter ?

Marc Lavoine : Si par miracle ce disque marche il se pourrait qu’on fasse des concerts avec comme fond d’écran des images qui ont construit ce conte. Des amoureux qui s’enlacent extraits des films qui nous ont inspirés, des images de danseurs étoile et avec un orchestre. L’autre possibilité est qu’un chorégraphe s’intéresse à ce projet car nous avons voulu faire un ballet et c’est la danse qui est mise en lumière. J’aime l’exigence des danseurs et des danseuses qui rentrent en vocation dans ce métier. C’est une discipline extrêmement difficile, sans doute l’art le plus difficile… Le corps et l’âme des danseurs sont quelque chose de très important pour eux. Je suis évidemment ébloui devant des oeuvres de Giacometti, de Picasso, de Buren… mais la danse c’est quand même mystérieux.

JustMusic.fr : Votre nouvel album solo sortira l’année prochaine alors à quand un nouveau film ou un nouveau livre vu le succès de « L’homme qui ment » ?

Marc Lavoine : Il y aura sans doute un prochain livre, mais il est très difficile d’écrire le deuxième donc je vais peut-être commencer par le troisième (sourire). Mais j’ai fait un scénario d’après « L’homme qui ment » avec Claire Barré car j’avais besoin d’avoir quelqu’un qui avait la structure intellectuelle et artistique pour m’apprendre à écrire un scénario. Je l’ai proposé à Audrey Dana qui jouera le rôle titre, Antoine Cluzet et Pio Marmaï. Ensuite, je construirai le casting et l’équipe, tout va se préparer en février pour un tournage au printemps.
Je vais aussi partir en tournée pour « Le poisson belge » pendant 4 mois. Géraldine Martineau ma partenaire a obtenu le Molière de la révélation féminine et c’était bien mérité. En tant qu’acteur soliste appelé par un metteur en scène, aujourd’hui je n’ai pas de nouvelles. Il y a tellement de bons acteurs de ma génération en France comme Vincent Lindon, Vincent Cassel ou encore Lambert Wilson qu’il faut beaucoup travailler pour rester présent à l’esprit des gens pour qu’ils nous proposent quelque chose. J’essaie de le faire en espérant recevoir d’autres rôles, mais entre le théâtre et la musique il y a aussi un calendrier. Je travaille beaucoup et j’espère que je pourrai inspirer d’autres metteurs en scène comme l’ont fait Tony Gatlif, Claude Chabrol, Pierre Boutron, Marc Esposito, Claude-Michel Rome, Xavier Duranger… et qu’ils me proposeront de beaux rôles (sourire).

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Retrouvez « Les souliers rouges » sur Facebook et sur Twitter.

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